Monday, August 06, 2007

Et une baffe, une, pour nous autres pauv' cons

Hier fut une journée mémorable. Les Libanais ont eu le plaisir d'assister à la bonne marche du système électoral libanais. Ce qui suit est un bref résumé du processus. Franchement, des fois on oublie qu'on est dans le troisième millénaire.

Tout commence par l'assassinat, à visage découvert(1), d'un membre du parlement libanais. Jusque là rien d'extraordinaire on est plutôt blasé, je sais. En fait ça commence plus tôt, quand ce même hurluberlu se retrouve "élu du peuple" grâce à une entente implicite avec les vainceurs prédestinés. Comment ça marche exactement? Faut demander au Patriarche maronite. Allez savoir, c'est peut-être même le Grand Pope en personne qui s'en est occupé. Mais bon, revenons à nos élections, celles supposées remplacer le siège laissé tout vide(2) par le-dit martyr. Les camps sont les mêmes. D'un côté, un "docteur" totalement inconnu et tout habillé d'orange comme l'oranger-mère qui, lui, habille d'orange ses députés et de laïcité son discours confessionnel, ainsi qu'un dinosaure électoral (en voie de disparition) dont les capacités réelles sont plus que douteuses, et leurs alliés de confession arménienne(3) qui, eux, s'arment de silence et d'union sacrée. De l'autre, le papa du martyr, ex-président de la république, "chef suprême" (oui oui) du parti fasciste libanais, monsieur brushing pour les uns, marchand exclusif du sang familial pour d'autres, et ses alliés, un parti tout-puissant qui puise sa force surhumaine d'une potion magique bonne poignée de dollars et d'un support franco-américano-séoudite(4), et leurs alliés, des partis au passé milicien qui n'attendent qu'une chose c'est de vider leurs réserves de cartouches pour en obtenir de plus nouvelles.

Le décor est installé, le champ de bataille aussi... Non attendez ce n'est pas si simple. Le candidat à l'orange trouve génial l'idée de contester la tenue d'élections parce qu'elles n'ont pas été officiellement approuvées par le président de la république (çui-là ça fait trois ans qu'il somnole sur ses chloriers et qu'il s'est constitutionnellement rendu tout à fait inutile). L'autre, le candidat toujours faché, se fache de la tenue d'élection à plus d'un candidat, puisque pour lui, le siège de son fils devrait lui revenir naturellement(5). D'un côté, la contestation ne trouve pas organisme constitutionnel compétent capable de juger sur la matière et tombe dans le shredder géant de la justice libanaise, et de l'autre, les accusations de trahison explosent et giclent dans tous les sens et le ridicule n'épargne même pas le patriarche(6) dans sa demeure (f)estivale.

Le décor est installé, le champ de bataille aussi... C'est à vous de jouer maintenant. Vous avez réussi à obtenir votre carte d'électeur (c'est pas évident pour tout le monde, l'Etat libanais pratiquant ouvertement le favoritisme) et vous avez fait votre choix. Entendons-nous, celui-ci est spectaculairement conditionné par les médias qui se torchent les antennes avec la loi électorale, par l'historique familiale, l'enchère des offres de services, 500 dollars US (trois fois le SMIC), la nécessité de se conformer au groupe identitaire de peur de disparaître de la carte politique, etc. mais vous avez tellement envie de croire au libre choix et à la démocrassille que vous tenez votre carte à deux mains et vous foncez vers le bureau de vote.

Devant le bureau de vote, c'est la foire au village en pleine ville. C'est tout en couleur (j'aime la vie en multicolore, écrivait l'autre analphabète) et ça joue des discours de haine en boucle. Pour accéder aux urnes (sexuées, attention), il vous faut accepter toutes sortes de "listes" (à nom unique) pour éviter les conversations déplaisantes. Vous triez les listes, puisque la plupart sont pipées, et vous entrez dans le bureau improvisé. Là, après avoir crié votre nom triple et votre confession(7), un septagénaire tout grisâtre, le pauvre il est vraiment pas bien lui, vous tend une toute petit enveloppe avec plein de tampons dessus. C'est génial. Votre coeur palpite. Vous remerciez tout bas Monsieur Bush d'avoir répandu la démocratie dans votre pays, vous sortez votre "liste", vous la glissez, vous léchez, vous collez, vous glissez de nouveau, vous signez, vous sortez. C'est ça l'intégration sociale, Monsieur Sarkozy.

La journée passe. On s'excite de part et d'autre du panorama médiatico-politique. On ferme les urnes. On compte les votes. On essaye de tricher. Les rumeurs fusent. La désinformation aussi. On essaye d'emflammer la rue pour détourner l'attention des résultats. On accuse ceux-ci et ceux-là. On perd les boules. On lance des propos racistes. On conteste. On déguise les résulats. On engage de faux analystes. On gagne. En face, on gagne aussi. C'est normal, personne n'aime perdre. Personne ne perd. C'est ça la vraie démocratie, tout le monde gagne.

Le lendemain c'est le même refrain. C'est la tempête après le cyclone. Les médias, qui font part entière dans la bataille, n'ont pas fini la campagne. Tous ont gagnés. Les autres ont triché, ou tout simplement "perdu politiquement". C'est traditionnellement le temps de recourir à la justice pour contester les résultats ou annuler le décompte de quelques urnes. Mais encore faut-il reconstituer le conseil constitutionnel que vos alliés ont trouvé judicieux de dissoudre quelques mois plus tôt parce que menaçant pour leur majorité au parlement.

Les élections au Moyen-Age, je vous dit c'est le bordel. Ca serait tellement plus sympa pour tout le monde qu'on organise des combats de chefs à mains nues, comme au temps d'Astérix. Au moins ce serait eux qui recevraient toutes les baffes.


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(1) Des visages que personne n'a pu reconnaître, c'est trop cool pour ce tout petit pays. Enfin! On peut y croire aux films américains.
(2) Pas totalement vrai puisque, en tout cas, le parlement libanais ne s'est pa réuni depuis belle Berryette et tous ses membres se sont agréablement retrouvés au chômage technique tout en touchant leurs salaires + benefits.
(3) En fait, ce que beaucoup de ces fachos n'ont jamais compris, c'est que les "arméniens" du Liban ne le sont que d'héritage, leur nationalité et appartenance socio-politico-fiscale étant purement libanaise. Mais bon, allez expliquer à un Lepenniste que Zidane est aussi Français que lui, bonne chance.
(4) C'est pas de la théorie, là on est en plein travaux pratiques.
(5) Voyez-vous, au Liban, l'héritage politique se fait horizontalement dans les deux sens.
(6) Le patriarche maronite: une sorte de poste ecclésiastique hérité du Moyen-Age, nourri par la foi et la mafia politique, s'assied sur un coffre, marche sur des tapis rouge, et dort sur un sabre croisé.
(7) A ce moment vous mourrez d'envie de crier que vous n'en avez rien à foutre de votre confession ou de celles des autres. Mais vous vous retenez, après tout, l'important c'est que votre petit papier soit compté.

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16 réactions:

Anonymous Anonymous...

Rje3na w rej3o habeyebna
CLASSIC.... Seriously just classic!! It's like, so cool, like.... OH MY GOD!
It was worth the wait man.

My honest opinion: A bas l'ingenieurie, vive le journalisme...

August 08, 2007 5:25 AM

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Anonymous Anonymous...

"no comment"...Excellent!
Moi je dis: rentre en politique et je vote pour toi! Parce que franchement (n'etant pas maronite: seul desavantage...) je n'ai aucune chance de devenir Raiis a la place du Raiis...

Izverygood

August 08, 2007 8:52 AM

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Blogger Unknown...

the dude > I was like, helloooooo? et puis..... vive l'ingénieurie, c'est honnête.

anonya > t'es pas maronite? alors regarde ce que tu dois faire. tu te fais (ou hérites) quelques milliards, tu fais couler du sang, tu remportes les 2/3 du parlement et puis tu amendes la constitution. (remarque: ce plan ayant échoué en 2005, faudra tout y mettre hein?).

et puis merci de ne pas avoir corrigé mes fautes d'orthografffe. vous êtes hyper cooooule.

August 08, 2007 10:05 AM

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Blogger Moussa Bashir...

too bad my french sucks... anyway just saved this for help in translation :-)

August 08, 2007 8:47 PM

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Blogger Sophia...

Phil,
Merci d'avoir visité mon blog. Cela m'a permis de découvrir le ten qui est pas mal. Je me suisretenue de rire plusieurs fois en lisant ce post. Et parce que j'ai beaucoup d'amitié pour Moussa Bashir, je vais essayer de voir ce que je peux faire avec mon anglais ppour traduire de l'humour si grinçant et le lui envoyer par mail. Cela prendra un peu de temps...

August 09, 2007 12:57 PM

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Blogger Unknown...

m bashir > well i wish i could think best in english. maybe i should try that from time to time. yep, i'll do that.

sophia > Waouw! Ce serait trop cool de ta part. Let me know how it goes ;) Et puis vos deux blogs ne manquent pas d'inspiration et de tact, c'est dommage que je ne les découvre que maintenant. Merci pour ton commentaire et à plus tard!

August 09, 2007 3:08 PM

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Anonymous Anonymous...

Quel honte, ce système électoral. No Wonder pourquoi mes parents ne votaient pas avant la guerre, il disaient que c'était de la 'bahdalé'et le comble c'est que ça na pas changé, au pays qui se décrit comme le berceau de la civilisation.

August 11, 2007 4:49 AM

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Anonymous Anonymous...

Phil> l'ingenieurie ce n'est pas honnete. C'est objectif. En plus, il y a tellement de politique que ca reviens au meme!

As to voting for you if you run, I will need to sit with you again cos it seems you are starting to lose that direction you had. (Sorry dude, but the cairo episode is still bugging me! MALL?????)

August 13, 2007 7:14 PM

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Blogger Sophia...

Phil,
Voici ma traduction anglaise de ton article. Pas très brillant mais mieux qe rien, ctoutcequeje peuxfaire. Peux-tu l'envoyer à Moussa Bashir STP ?

This is a translation of a caustic commentary on the last Lebanese parliamentary elections (August 5th) in Metn that show two Christian parties, the sectarian feudal Kataeb, led by late anti-Syrian politician Amin Gemayel, and the Free patriotic Movement, led by early anti-Syrian politician Michel Aoun, oppose each other in a showdown that left Aoun triumphant and Gemayel defeated in his own mountain stronghold, despite both parties still claiming victory, especially the defeated...


Yesterday was a memorable day. Lebanese had the opportunity to witness the good functioning of their electoral machine in its full force. Frankly, in Lebanon one can forget that we live in the third millenium.

Yesterday's election started when an assassination of a member of the Lebanese parliament took place one morning in a busy street under the watch of witnesses rendered mute by a new Omerta which implies that no matter who assassinates in lebanon it must always be Syria's fault. Until then, nothing new, Lebanese have become fortunately (or not) blasés. In fact, this series of events were bound to start when the crank who, before being assassinated early this year and becoming a 'martyr', had become representative of the people of Lebanon in 2005, thanks to an implicit agreement with yesterday's official victors (that's because both sides are 'victors' in yesterday's elections, or at least that we are led to believe when one side is declared victor by the ministry of interior and when March 14th and Gemayel, the official loosers, decide that they were the effective victors).

But how things work exactly in Lebanon ? One has to ask the Maronite Patriarch or may be even the Pope, who knows... But lets get back to August 5th election in Metn that were supposedly meant to fill the seat left vacant by the 'martyr'. To the father of the 'martyr', ex president of Lebanon, supreme leader of the lebanese fascist party, Kataeb, Mr. 'Brushing', exclusive retailer for the family blood, for some, and his allies, a super powerful party who derives his power from a magical potion made with a fistful of money and a stroung French-US-Saudi support, who was running the election in order to fill the seat of his son, the Free Patriotic Movement opposed a "doctor" totally unknown from the public, dressed in orange like the party (FPM) and its leader, an electoral dinosaur destined for extinction, whose real capacities are put into question, and his Armenian allies silent behind their sacred union.

Gemayel's mindset is that his son's seat must naturally be given to him without holding elections. The doctor's mindset is that these elections are illegal because they were not approved by the president of the republic of lebanon who is being continually bypassed by Gemayel's allies, March 14th. But neither candidate would be vindicated since contesting the elections is not possible because the constitutional authority of the country who is able to judge such matters was disbanded, and the Maronite patriarch (the kind of your mafia clergyman, walks on a red carpet and sits on a coffer full of money) who tried to resolve the Christian 'dispute' was becoming increasingly inconsistent in the statements sent from his summer residence.

It was then for the voter to decide, although it wasn't easy for the voter to acquire his voting card. That's because the Lebanese state openly practices favoritism. But lets suppose you succeeded in obatining your voting permission. You still have to be able to cross intact the media barrage of misinformation who air in a nauseous repetition the electoral law as such without explaining it. You still have to be able to free yourself from the historical political allegiances of your own family. You still have to refuse the numerous offers of kind and generous services in exchange for your vote. You still have to refuse selling your vote for 500 US dollars, three times the minimum salary in Lebanon. You still have to ignore what is being presented to you as a threat that is a vote against your community that might contribute to the disbanding of the identity of the sect you belong to and to their political disappearance. But as an individual living in the third millenium you want to believe that democracy exists and that you have the free will to exercice your own political choice.

You arrive at your voting precinct and outside it is a hate fair. To access the divided by gender ballot boxes, you have to take all the candidate lists that are shown, even though some are flawed, you will sort them out later, behind the curtain. After choosing the list you walk toward the box and scream your name and religion three times in front of an old man who then gives you an enveloppe covered with ruberstamps in which you slide your list. At his point you feel your heart beating. You thank, with a murmur, Mr. Bush for spreading Democracy in your country.

The day passes. The media are excited. The ballot boxes are counted. The rumours and disinformation spread like fire. They try to cheat. They also try to inflame the street, to provoke, in order to distract from the announcement of the official results which are unfavourable for them. They accuse. They loose nerves. They throw racist remarks in front of the media to explain the unfavourable results. They engage official 'analysts'. They disguise results. They claim they won. The other side claims that they also won. That's normal nobody likes to loose. It seems that this is real democracy and that everybody wins in a democracy.


The day after it is the same refrain. The tempest after the cyclone. The media who are inside the battle did not finish their own campaign. Everybody won, The others have cheated or they have "lost politcally". Usually it is the time when they should have run to the justice to protest the results or to recount. But thay cannot because those who are unhappy with the results have disbanded the constitutional council few months earlier in order not to preserve their "majority" in the parliament.

Ah, elections in the middle ages, I can tell you, are a mess. It would be more fun if we organise a fight between the two leaders, like in the time of Asterix, the Gallic hero. This way, the chiefs will receive the slaps and we will be the ones who watch...

August 13, 2007 8:18 PM

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Blogger Unknown...

kheireddine > on croit qu'on a hérité les gênes de ceux qui ont inventé l'alphabet mais on n'est même plus capable de lire, encore moins d'écrire.

The Dude > Cairo does not leave you any choice. rest assured, my allegiance will always be to the antichrist.

sophia > merci d'avoir pris le temps de traduire le post! je l'ai forwardé et je le garde ici pour référence. en gros tu es restée fidèle à l'esprit. merci encore.

August 14, 2007 10:16 AM

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Blogger Sophia...

Oup?
Une faute cependant.
"But thay cannot because those who are unhappy with the results have disbanded the constitutional council few months earlier in order not to preserve their "majority" in the parliament."

IL faut remplacer par "In order to preserve their majority in the parliament. Lapsus significatif de mon état d,esprit.

August 14, 2007 1:32 PM

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Anonymous Anonymous...

It's not the antichrist allegiance that I was referring to...

August 16, 2007 2:29 AM

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Anonymous Anonymous...

Oh and I just realized the most OBVIOUS comment there was to make on this article:

Quel con....

August 16, 2007 5:25 PM

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Blogger Unknown...

sophia > la faute est facilement repérable ;)

the dude > yes yes, my allegiance is to you. but wouldn't that make you a "con" too?

August 17, 2007 6:48 AM

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Anonymous Anonymous...

I am disappointed that you don't know what I am talking about... Walaw, all this time be Venice, teaching Sakon and living in Westmoreland raho de3an... Alla ysemhak bas

August 17, 2007 6:54 AM

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Blogger Unknown...

Erratum:
(5) Voyez-vous, au Liban, l'héritage politique se fait verticalement dans les deux sens.

August 24, 2007 9:46 AM

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